« Les phrases et les rails, les mots et les tressautements sur les traverses, la vitesse, les maisons, les églises, les champs, les forêts qui déferlent, la sensation de sortir de prison et de prendre la poudre d’escampette, de se dépouiller de sa propre histoire et en même temps de se solidariser avec un soi-même que les habitudes fixes ont engourdi. La tranquillité dans le mouvement incontrôlable, la joie d’être en même temps à l’abri et à découvert. Une rare occasion de cesser de désirer écrire et d’écrire enfin, de lâcher les rênes, de laisser la cavale trotter à sa guise. L’aubaine de transiger d’égal à égal avec le temps, de déraisonner pour de bon. Vous saluez la voie libre, honorez l’insouciance, seule capable de faire échec à la menace constante qui pèse sur vous, et le fragile équilibre enfin trouvé. » Après en avoir lu quelques-unes à l’émission Bien entendu à la radio de Radio-Canada, Robert Lalonde rassemble ici des pages de carnets où il évoque la place souvent centrale qu’occupe le chemin de fer dans la vie et l’œuvre de ses auteurs de prédilection. Il partage aussi avec nous ses propres souvenirs ferroviaires, nous fait monter en sa compagnie à bord des trains qu’il a pris ou qui l’ont fait rêver, l’Al Andalus, qui va de Saint-Jacques-de-Compostelle à Séville, ou encore le tortillard qui longeait le fleuve entre Québec et La Malbaie.